C’est avec grande joie que nous avons appris la libération de l’artiste Ahmed Laabidi, alias Kafon, dans la soirée du mercredi 19 mars 2014.
Ce jeune chanteur, interprète de la chanson « Houmani » qui a eu un grand succès dans tous les coins de la Tunisie et a touché toutes les composantes de la société tunisienne des jeunes aux plus âgés; des habitants des banlieues riches à ceux des quartiers populaires, a été condamné le 4 juillet 2013 à un an de prison ferme et 1000 dinars d’amende pour avoir consommé du cannabis. Il s’agit de l’amende minimale pour la consommation de stupéfiants.
Rappelons qu’en Tunisie, la loi n°92-52 du 18 mai 1992 relative aux stupéfiants est très sévère et répressive. Voici ce qu’elle dit :
« Article 4 : Sera puni de l’emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de mille à trois mille dinars, tout consommateur ou détenteur à usage de consommation personnelle de plantes ou de matières stupéfiantes, hors les cas autorisés par la loi. La tentative est punissable.
Article 8 : Sera puni de l’emprisonnement de six mois à trois ans et d’une amende de mille à cinq mille dinars, quiconque fréquente sciemment un lieu affecté et aménagé pour l’usage des stupéfiants et dans lequel il en est fait usage. »
Cette libération vient après une lettre ouverte au chef de gouvernement Mehdi Jomaa et des débats sur la loi 52, entamés par l’avocat de Kafon Ghazi Mrabet et son collectif « Al Sajin 52 » (traduction « Le prisonnier 52 »). Ces débats ont eu pour objet d’oser discuter de ce sujet, resté tabou depuis le régime de Ben Ali, et de confronter les avis sur le besoin de faire évoluer cette loi qui concerne des milliers de Kafon en Tunisie. En effet, d’après les chiffres, plus de 30% des personnes carcérées sont des consommateurs de substances illictes, et ce nombre n’a cessé d’augmenter malgrè l’existence de cette loi.
Voici le lien d’un débat réalisé avec Nawaat entre des anti et des pro-cannabis, des acteurs de la société civile, des médecins et des avocats engagés dans ce sujet:
Cette bonne nouvelle, survenue quelques semaines après la libération d’autres artistes, consommateurs de cannabis, prisonniers d’opinion comme Weld15, Jabeur Mejri etc, me donne encore plus d’espoir, les différentes luttes pour des causes diverses comme celles-ci prennent du temps certes mais finissent par payer; surtout quand je regarde encore une fois, la mobilisation de la société civile, cette liération de parole, cette soif des débats qui n’en finissent pas et cette ouverture intellectuelle qui nous manquait tant !
Je n’ai jamais autant apprécié la chanson de Houmani, qu’aujourd’hui: