Accueil > Actions > Compte-rendu de la table ronde sur la Constitution tunisienne

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La nouvelle constitution tunisienne a été adoptée le 26 janvier 2014 par l’Assemblée Nationale Constituante, avec une majorité écrasante (200 voix pour, douze contre et quatre abstentions).

Après avoir suivi les nombreux débats quotidiens sur les différents articles et amendements au sein de l’ANC que cela soit pour la version brouillon ou définitive, les membres de JTLD ont organisé une table ronde le 1er février 2014 pour échanger sur cette constitution nouvellement validée.

Cet article regroupe les remarques et les impressions qui en découlent.

D’une manière générale, la constitution reflète un texte de consensus et de compromis, écrit par les partis composant la scène politique actuelle. En effet, il s’en ressent une juxtaposition de couleurs politiques au détriment d’une vision commune et réunificatrice pour la Tunisie d’aujourd’hui et de demain.

Nous nous sommes arrêtés aux articles ci-dessous qui nous semblaient discutables.

▪               Préambule

La référence à la révolution dans le préambule est nécessaire car sans celle-ci la constituon n’aurait pas vu le jour; ceci dit, mettre comme date de début le 17 décembre 2010, entraîne un oubli des révoltes qui se sont passées bien avant comme celles de Gafsa, Redeyef (2008); qui ont sans conteste amorcé le mouvement de révolte de décembre 2010.

Le préambule est vague et représente un mélange de toutes les sensibilités représentées au sein de l’Assemblée, on y remarque la présence de l’universalité des droits de l’Homme et un fort attachement aux enseignements de l’Islam et à l’identité arabe contre aucune référence aux influences identitaires et culturelles d’origine méditerranéenne, berbère etc.

D’un autre coté, la libération de la Palestine est mentionnée alors que cette cause, bien qu’elle touche tous les tunisiens, n’a pas lieu d’être dans une constitution. En effet, il s’agit plus d’un travail de sensibilisation à cette cause. C’est bien la première fois qu’un pays fait référence à un autre pays dans sa constitution. Là encore, nous remarquons le poids du consensus, étant donné qu’un amendement a déjà été refusé et le fait de recourir à cette mention signifie qu’un facteur extérieur pourra faire amender la constitution de notre pays.

▪               Article 1er et article 2

Même si l’article 1er, inchangé depuis la constitution de 1959, peut sembler flou quant à l’Islam, comme religion de la Tunisie, l’article 2 stipule clairement le statut civil de l’Etat.

▪               Article 5

Le fait de mentionner la république tunisienne faisant partie du maghreb arabe existe depuis la constitution de 1959 mais n’a pas permis de régler les problèmes entre les pays de l’union (exemple: Algérie / Maroc).

▪               Article 6

« L’Etat est gardien de la religion » (même si la traduction ne nous semble pas adéquate) pousse à se poser la question de si on parle de religion unique ou de la Religion en général; il aurait été plus judicieux d’écrire « des religions ». Par contre, il y a aussi une bonne interprétation  de cette première phrase: elle permet d’éviter que des individus ou organisations se proclament garants de la religion. La notion de « libre exercice des cultes et de la neutralité des mosquées et des lieux de culte » est intéressante dans la mesure où citer les mosquées indépendamment des lieux de culte permet de mettre l’accent sur et les mosquées (lieu de culte majoritaire en Tunisie) et les autres lieux de cultes tout aussi importants, à protéger.

La 2ème partie de l’article concerne la protection du « sacré », mais en quoi consiste le « sacré », qui le définit? Ici,  nous alertons sur le danger de la limitation de la liberté d’expression; ne perdons pas de vue l’emprisonnement de Jabeur Mejri par exemple.

Quant à la lutte contre les appels au « takfir » (accusation d’apostasie), ceci peut être sujet à plusieurs interprétations et limiter la liberté de conscience et d’expression.

Quand on analyse cet article d’une manière globale, on remarque bien l’aspect consensuel, qui a été difficilement obtenu. Cet article permet des libertés qu’il se presse de limiter par la suite.

▪               Article 7

Citant la famille comme cellule de base de la société peut entraîner un risque pour le droit de divorce, d’autant plus qu’il n’existe pas d’articles le mentionnant. Il faudra bien examiner les lois qui en découlent.

▪               Article 13

Cet article restaure la souveraineté du peuple sur les ressources naturelles du pays; ce qui constitue une avancée et une garantie pour les générations futures.

▪               Article 19

Les traités internationaux se situent à un niveau au-dessous de la constitution, étant donné qu’il faut qu’ils soient approuvés par l’assemblée représentative. Même s’il est important de garder la souveraineté du peuple, certains traités qui ont pour but la protection de l’individu, comme le traité de Genève ne seront à priori pas automatiquement appliqués. Pour approfondir l’analyse, il faudrait travailler sur des cas concrets. Notons qu’une vulgarisation sur les traités internationaux est à faire de la part des politiciens, jusque-là certains traités étaient ratifiés sans consulter le peuple.

▪               Article 21

On parle de l’égalité des citoyens et citoyennes mais aucune notion aux étrangers n’est faite dans toute la constitution, il aurait été mieux de mettre les individus « افراد ».

La notion d’égalité des citoyens et citoyennes devant la loi et non dans la loi suppose le contrôle des lois par la suite. Une question se posera aussi sur l’héritage.

▪               Article 22

Le « droit sacré à la vie, sauf dans des cas extrêmes fixés par la loi » montre que l’atteinte au droit à la vie dépend de ceux qui gouvernent et des législateurs. L’abolition de la peine de mort n’est donc pas constitutionnalisée et ce sont les lois qui fixeront par la suite le sort du droit à l’Interruption Volontaire de Grossesse, la peine de mort et l’euthanasie.

▪               Article 39

Une focalisation de l’identité arabo-musulmane évince une partie de notre Histoire et de notre culture et ne considère pas les minorités: amazigh / berbères etc.

▪               Article 52

Une autonomie administrative et illimitée de l’Assemblée des Représentants du Peuple impose une instance pour surveiller les dépenses et le budget telle la cour des comptes.

▪               Article 55

Cet article représente une grande avancée et un nouvel acquis pour les tunisiens résidant à l’étranger, étant donné qu’ils peuvent désormais être représentés dans l’Assemblée des Représentants du Peuple.

▪               Article 74

Il s’agit d’un article très positif pour les binationaux,  via le droit de se présenter aux élections présidentielles même si en cas d’élection ils se verront dans l’obligation de renoncer à leur autre nationalité. D’autre part, le fait qu’il n’y ait aucune condition sur le conjoint est aussi positif. Par contre, la condition d’être de religion musulmane est une forme de discrimination et exclut les juifs tunisiens, les athées, les chrétiens. Plutôt que de constitutionnaliser cela, pourquoi ne pas laisser le peuple libre et souverain juger et choisir parmi tous les tunisiens, supposés être égaux.

▪               Article 90

Article très positif car il interdit le cumul des fonctions de membre du Gouvernement avec celles de membre de l’Assemblée des Représentants du Peuple est constitutionnalisé. Cet article affirme la séparation des pouvoirs entre le législatif et l’exécutif.

Conclusion

Cette constitution garantit des droits pour les tunisiens résidant à l’étranger et les binationaux. En effet, pour la première fois en Tunisie, ces citoyens peuvent êtres représentées dans l’Assemblée des Représentants du Peuple et sont éligibles à la présidence de la République comme le serait tout autre citoyen tunisien. Nous ne pouvons que nous en féliciter, car souvent pour ces tunisiens à l’étranger, qui ne choisissent pas leur pays de naissance ou leur appartenance à une double culture, avaient souvent été oubliés ou considérés comme tunisiens de seconde zone.

D’une manière générale, même si cette constitution relève de beaucoup de compromis entre courants politiques de sensibilités divergentes et contient des articles flous, contradictoires et perfectibles, nous y trouvons beaucoup d’avancées vers la démocratie: cour constitutionnelle constitutionnalisée, ressources naturelles préservées, la santé pour tout être humain et non citoyen (article 38), reconnaissance de la pluralité politique, une éducation gratuite et obligatoire, la mention claire des libertés garanties.

Il est tout de même regrettable qu’un des projets qui nous tenait le plus à cœur, concernant la constitutionnalisation du Haut Conseil des Tunisiens de l’Etranger (HCTE), n’ait pas trouvé écho au près des autres élus au sein de l’assemblée. Nous espérons néanmoins, voir ce projet se concrétiser sous forme d’une loi.

Et vous ? Qu’en pensez vous ? Donnez nous votre avis dans les commentaires !